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Verlaine

1:L'auteur

Après le baccalauréat obtenu à Paris, Paul Verlaine trouve un emploi dans l’Administration. Parallèlement, il fréquente les parnassiens, et publie en 1866 les Poèmes saturniens, qui révèlent au public une âme inquiète et musicale. Ayant publié sous pseudonyme Les Amies, scènes d’Amour saphique, il embrasse en Mathilde Mauté l’illusion du bonheur conjugal. Un an après les Fêtes galantes de 1869, il chante cet « être de lumière » dans La Bonne Chanson.

Mais la rencontre exaltante du jeune poète et beau génie, Arthur Rimbaud, lui inspire une passion, qui vient rompre l’espoir d’une vie « simple et tranquille ». Ces deux « compagnons d’enfer » mènent ensemble une existence vagabonde, tumultueuse et libre, qui se solde par une querelle à Bruxelles, en 1873, au cours de laquelle Verlaine blesse son amant d’un coup de revolver. La blessure est légère, mais Verlaine est condamné à deux ans de prison. Ces errances amoureuses et poétiques inspirent à Rimbaud Une saison en enfer, et à Verlaine les Romances sans paroles. Dans sa prison, Verlaine, pris de remords, tente de se rapprocher de Mathilde et de Dieu. Les vers de Sagesse rendent compte de cet effort de conversion. Mais Mathilde le repousse. Les aspirations sincères et religieuses qui s’expriment dans Jadis et Naguère, Amour et Liturgies intimes, sont traversées de désirs sensuels, d’où il tire des poèmes érotiques : Parallèlement, Hombres, Chansons pour elle et Odes en son honneur.

Il sombre dans l’alcool et dans la misère. Il a en outre la douleur de perdre son jeune amant, Lucien Létinois, puis sa mère. Il fait connaître au public Les Poètes maudits qui méritent justement d’être connus : Tristan Corbière, Mallarmé, Rimbaud, Marceline Desbordes-Valmore, Villiers de L’Isle-Adam et ... Pauvre Lélian, anagramme de Paul Verlaine. Lui-même, alors commence à être reconnu. On lui réclame des conférences, il est sacré « Prince des poètes ». Mais il meurt dans le dénuement en 1896.

2:Poésie et nature

La nature est le lieu ordinaire des poèmes de Paul Verlaine : « Soleils couchants », « Clair de lune », « Chanson d’automne », reprennent en fait des motifs chers aux romantiques. Mais chez Verlaine, la nature est symbole, reflet d’une âme en peine. « La mélancolie/ Des soleils couchants » est l’écho de lumière d’un sombre sentiment. Parfois, la nature riante sait réjouir le poète : « Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches/ Et puis voici mon cœur qui ne bat que pour vous. » Ou alors, elle est l’image de la sérénité à laquelle il aspire : « Le ciel est, par-dessus le toit,/ Si bleu, si calme ! » Mais l’angoisse de Verlaine finit toujours par se révéler, « au calme clair de lune triste et beau ».

En réalité, Verlaine peint bien moins la nature que des états d’âme : « Votre âme est un paysage choisi ». Par son art du paysage, il excelle à rendre les nuances du cœur : « Il pleure dans mon cœur/ Comme il pleut sur la ville. » Les effets de lumière, de couleur, tout en subtilité, s’accordent à la délicatesse de ses vers : nulle emphase, nul excès. Loin des effets de manche de la poésie romantique, Verlaine révèle ses sentiments avec humilité. Rarement poésie sembla plus authentique. Une même sincérité anime ses vers lorsqu’il exalte Dieu, ou chante ses amants. Les élégies* écrites après la mort de Lucien, par exemple, sont d’une lecture poignante.

Bien plus que la nature, Verlaine, dans ses vers, trouve ce que bien peu avant lui avaient su rendre : le naturel. La candeur, la naïveté, la pureté nouvelles de ses poèmes, sont le travail d’un art exquis qui se fait oublier. « L’art, mes enfants, c’est d’être absolument soi-même. »

3:Poésie et musique

« De la musique avant toute chose » réclame Verlaine dans son « art poétique* ». Lui-même choisit pour ses poèmes des formes musicales : ariettes, romances, chansons. Nombreux d’ailleurs sont les compositeurs qui mettront ses vers en musique : Debussy, Fauré, Duparc... « Écoutez la chanson bien douce », dit-il dans Sagesse. Sensible à leur écho, il songe à « l’inflexion des voix chères qui se sont tues ». Les luths, les mandolines, les sérénades, « Les sanglots longs/ Des violons/ De l’automne », bercent ses vers.

Mais la musique n’est pas seulement un thème privilégié. Elle est l’essence même de la poésie de Verlaine. Il utilise avec bonheur le vers impair, dont la cadence rare, étrangère à l’oreille, étonne et charme. Il donne aux vers une grâce jusqu’alors inconnue. Il cherche pour ses rimes non pas l’intensité sonore de vulgaires cymbales, mais la fluidité légère d’une douce mélodie. Au besoin, il sait rompre les rengaines de l’alexandrin grâce aux coupes, rejets, et autres libertés opportunes, sans ostentation cependant. De ses vers se dégage un lyrisme discret et intimiste, et si la poésie est ce qu’il y a d’intime dans tout, comme l’assure Hugo, alors Verlaine est le meilleur poète de ce siècle.

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