Alcools ( Guillaume Appolinaire)
Résumé et commentaire
À l’aube de la Grande Guerre, Guillaume Apollinaire publie un recueil de poèmes sous le titre
Alcools. Il rassemble ainsi des pièces écrites dans les quinze dernières années, et livre au
public étonné peut-être le recueil le plus marquant de ce siècle en France.
L’ouvrage compte, outre des poèmes isolés, quelques ensembles comme « La Chanson du mal-aimé »,
« Le Brasier », « Rhénanes », « Les Fiançailles », « À la Santé ». Ce recueil consacre le souverain
imaginaire du poète, que ses errances poétiques conduisent d’un espace à un autre, au gré de ses
caprices. Les premiers vers de « Zone », et par conséquent du volume entier, sont pour ainsi dire
la clé de tout l’ensemble : À la fin tu es las de ce monde ancien
D’emblée, Apollinaire semble donner congé aux traditions dans lesquelles il puise pourtant
abondamment. Sans compter les sources bibliques ou mythologiques, il reprend dans ses vers le
style lyrique* et élégiaque des poètes romantiques et symbolistes. Mais il se veut un novateur.
Aussi l’alexandrin que voilà est-il dépourvu de ponctuation, comme le reste du recueil,
d’ailleurs. Apollinaire prétend ainsi libérer le vers, son rythme, sa cadence. Le vers suivant
révèle la hardiesse des innovations du poète : Bergère ô tour Eiffel le troupeau des ponts
bêle ce matin
Par le miracle de cette métaphore* appositive de la tour Eiffel bergère, le poète concillie
deux styles apparemment inconciliables, la poésie pastorale* et la poésie des villes. Il ne recule
à vrai dire jamais devant ces audaces, quoique les plus connus de ses poèmes soient d’une facture
plus classique. Parmi ceux-là, bien sûr, étincelle doucement la nostalgie crépusculaire de la romance
inspirée par le départ de sa bien-aimée, Marie Laurencin. Cette fois, l’auteur oublie provisoirement
toutes les innovations surréalistes et modernistes, pour se livrer tout entier à la tristesse
voluptueuse de ses vers qui coulent, à l’image du fleuve, à l’image du temps...
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Et nos amours
Faut-il qu’il m’en souvienne
La joie venait toujours après la peine
Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure
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