Investissement, capital et progrès technique
1 Investissement et prospérité
1.1 L'investissement : une notion à définir
L'investissement est un flux qui vient renouveler ou accroître le stock de capital.
Les investissements selon leur contenu : investissement matériel / immatériel
- L'investissement matériel mesuré par la Formation Brute de Capital
Fixe (FBCF) regroupe les achats de biens durables utilisés pendant plusieurs cycles de
production.
- L'investissement immatériel, constitué de l'ensemble des dépenses de Recherche et
Développement, achats de brevets, de formation du personnel et de publicité, a une part croissante dans
l'investissement des entreprises car il est source de Valeur Ajoutée pour le produit ou l'entreprise.
Les investissements selon leurs effets : investissement de renouvellement, de capacité et de modernisation.
On distingue les investissements en fonction de leur impact sur les capacités de production et sur l'emploi.

Investissement productif / improductif
Enfin on oppose parfois les investissements productifs (acquisition de matériel et de construction
pour produire des biens et des services) aux investissements non productifs de l'état, des collectivités
locales et des achats de logement par les ménages.
1.2 Pourquoi et quand investir ?
Les déterminants de l'investissement
La chute des investissements en période de crise conduit à s'interroger sur les déterminants de
la décision d'investir. On en recense quatre principales :
- La demande anticipée : les entreprises adaptent leur production aux débouchés
(vision keynésienne de la demande anticipée comme déterminant de l'investissement ) qui permet
de mettre en évidence l'effet d'accélération.
- La rentabilité ou profitabilité. Il faut que le taux de profit escompté soit
supérieur au coût réel des capitaux empruntés pour financer l'investissement (vision libérale)
- La situation financière de l'entreprise, elle ne doit pas être trop endettée
- Le coût relatif du capital et du travail qui détermine la combinaison productive
Les sources de financement
3 sources de financement :
- l'autofinancement (utilisation de bénéfices antérieurs),
- l'endettement (financement indirect auprès des banques ou direct sur le marché
par les obligations)
- l'augmentation de capital par l'émission d'actions
Dans tous les cas, l'épargne joue un rôle essentiel car c'est une offre de capitaux (des ménages ou
des entreprises) qui rencontre une demande sur le marché, l'investissement, en déterminant ainsi un taux
d'intérêt. Un taux d'intérêt élevé s'il favorise l'épargne peut être néfaste car il réduit la rentabilité
de l'investissement et réduit la consommation des ménages qui préfèrent spéculer.
Evolution du financement

1.3 L'investissement au cœur de la croissance ?
Le théorème d'Helmut Schmidt
"Les profits d'aujourd'hui font les investissements de demain qui font les emplois d'après-demain". Cette
phrase prononcée par le chancelier allemand en 1976 semble pertinente pour résumer la situation des Trente
Glorieuses puisqu'on y a observé une corrélation étroite entre le niveau d'investissement, la croissance et
l'emploi. Et de même, les économistes pensent que le faible niveau d'investissement des quinze dernières
années serait en partie responsable de l'atonie de la croissance et de la faiblesse des créations d'emploi.
Offre et demande stimulées
Les investissements réalisés par les entreprises constituent une demande pour leurs fournisseurs
qui vont augmenter l'emploi, la distribution de revenus pour les ménages qui vont eux-même augmenter
leur consommation finale qui générera une croissance … C'est ainsi que Keynes justifie l'interventionnisme
étatique sous forme d'investissement publique (politique de grands travaux). Ces investissements remplacent
ou complètent des investissements productifs insuffisants. Les libéraux s'opposent à ces dépenses qui génère
des déficits publics et décourage les initiatives privées.
Les investissements permettent de dynamiser l'offre de produits alors que les augmentations de capacité
favorisent les économies d'échelle qui rendent possible une baisse des prix. A son tour, elle va stimuler
la demande, puis la production puis l'emploi…
Conclusion : L'investissement, une condition nécessaire mais pas suffisante pour l'emploi
Comme nous l'avons vu, l'investissement ne se traduit pas toujours par des embauches. L'investissement
de renouvellement a un effet neutre sur l'emploi alors que l'investissement de productivité à un effet
négatif puisque l'entrepreneur est motivé par la baisse des coûts. On constate que sur la période 1960-1996,
l'Europe a beaucoup plus investi que les Etats-Unis tout en créant moins d'emplois. Une des raisons est que
les entreprises européennes ont privilégié les investissements de productivité qui ont entraîné une très forte
substitution du capital au travail au détriment de l'emploi, contrairement à ce qui a été fait aux Etats-Unis.
2 La relation entre progrès technique et croissance
2.1 Du progrès technique à l'innovation
Le progrès technique est l'ensemble des savoirs techniques et organisationnels qui
permettent de produire plus avec moins de facteurs de production. Il se traduit dans des
innovations qui donnent naissance à de nouveaux produits ou à de nouveaux procédés de
production.
Dans un premier temps, la recherche fondamentale donne naissance à des lois scientifiques et à
des inventions. Ces découvertes scientifiques sont exploitées au niveau de la recherche appliquée,
dont l'objet est de les transférer au plan industriel. C'est seulement à partir du moment où une
découverte scientifique sera utilisée dans le domaine commercial que l'on parlera d'innovation.
L'innovation de produit consiste à lancer sur le marché de nouveaux produits et services qui se
traduisent par la création de nouveaux besoins pour le consommateur. L'innovation de procédés passe
par la mise en œuvre de nouveaux procédés de production ou de nouvelles formes d'organisation du
travail.
2.2 Progrès technique et croissance
Schumpeter : les " grappes " d'innovations rythment la croissance
Schumpeter explique les mouvements longs de l'économie par les " grappes d'innovations ". Les phases
A de croissance sont liées à des " grappes " d'innovations majeures et à leur diffusion : révolution
ferroviaire et progrès de la métallurgie pour la phase A de 1848 à 1873, l'épuisement de leurs effets
dynamiques, leurs retombées négatives sont à l'origine du ralentissement de la croissance et de tendances
récessionnistes. L'évolution du capitalisme est ainsi marquée par une " destruction créatrice " : la
disparition et l'apparition de nouvelles techniques, la " mise en place de nouvelles fonctions de production
" rythment son développement. Cette analyse est parfois pour analyser le ralentissement de la croissance depuis
1974. Elle permet de mettre en relation l'essoufflement de la dynamique fordiste et une décélération du rythme
de l'innovation depuis les années 60-70.
Le cercle vertueux des innovations
Les innovations de procédés permettent de réaliser des gains de productivité et d'améliorer la compétitivité
prix, de réduire les prix de vente et de stimuler la demande. Les innovations produits jouent sur la compétitivité
produit, en augmentant sa qualité ou par l'innovation, elles permettent de susciter des nouveaux besoins chez les
consommateurs et d'augmenter la demande. Elles sont une réponse au cycle du produit.
Des transferts aux mutations
C'est à partir de l'analyse du cycle de vie du produit que Vernon a proposé une analyse de l'évolution
au cours du temps de la division internationale du travail : le produit est lancé dans les pays qui l'a crée
puis exporté vers des pays d'égal niveau de développement. Ensuite, la production normalisée, la recherche
d'économie sur les coûts peut justifier une délocalisation de fabrication. Un pays développé peut ainsi
importer un produit qu'il exportait dans une phase antérieure. Lorsque le produit atteint sa phase de déclin
dans les pays riches, il est possible de trouver des débouchés dans les PED.
Le progrès technique entraîne donc des transferts de technologies d'un pays à l'autre. Il permet
d'accélérer le développement des pays qui ont un retard technologique.
Le progrès technique est aussi au cœur des mutations du système productif. Dès les années 50, Jean
Fourastié a mis en évidence que le différentiel de productivité et de la demande selon les secteurs
expliquait le transfert des actifs du secteur primaire vers le secondaire et le tertiaire (" déversement
" d'Alfred Sauvy).
2.3 Des bouleversements économiques et sociaux
Des risques de substitution du capital au travail
Si à long terme, progrès technique et croissance sont positivement corrélés, on peut craindre à court
terme des effets négatifs du progrès technique.
- à cause de la substitution de capital au travail si le coût du travail est trop important par
rapport à celui du capital en cas de demande insuffisante pour absorber les gains de productivité
- à cause des difficultés d'adaptation de la population active aux nouvelles exigences des postes.
Les ouvriers sont obligés de se former, de se reconvertir pour rester employables (risque de chômage
technologique).
Un bouleversement social
Si en augmentant la productivité, le progrès technique a permis une hausse du pouvoir d'achat de l'ensemble
de la population et la diffusion massive de biens de consommation, il a aussi révolutionné la vie quotidienne.
Les révolutions se traduisent au XIXème siècle par l'urbanisation, la montée de l'individualisme et de la
bourgeoisie. Aujourd'hui, les moyens de communications tendent à dépersonnaliser nos relations, à nous rendre
exigeants et impatients, entrés dans le monde de l'immédiateté.
Quelques définitions :
- Effet d'accélération : Une variation de la demande finale induit une variation plus
que proportionnelle de l'investissement (J.M. Clark en 1917)
- Rentabilité économique = EBE/capital fixe *100
- Rentabilité financière ou profitabilité = EBE - frais financiers
(= coûts de remboursement des emprunts)
- Cycle de vie des produits : Théorie selon laquelle l'évolution au cours du temps
des ventes d'un produit peut être représentée par une courbe en S et décomposée en 4 phases successives :
le lancement, le décollage, la maturité, le déclin.
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